Nouvelle éruption à Montserrat
(Royaume-Uni/Antilles)

(Mars 2010)

Par Alain Guillon, responsable de la Commission de Volcanisme de la SAGA

Dôme de Montserrat
Vue nocturne du dôme andésitique

du volcan actif de l’île de Montserrat.

  L'île de Montserrat est située dans la partie nord de l'arc des Petites Antilles, au nord-ouest de la Guadeloupe (80 km). Un arc insulaire volcanique formé à la limite de la plaque tectonique Atlantique qui subducte sous la plaque Caraïbe (Voir mon article dans Saga Information de février 2010 sur le séisme d'Haïti). Presque toutes les îles le long de l'arc des Antilles sont le résultat d'un volcanisme lié à la subduction, avec des stratovolcans andésitiques, produits par des éruptions explosives, couplé avec la croissance de dômes ou d’aiguilles de lave (Montagne Pelée, 1902), des coulées pyroclastiques associées et l'extrusion occasionnelle de coulées de lave.

  Montserrat mesure 16 km de long (du nord au sud) et 10 km de large (d’est en ouest) et est construite presque exclusivement de roches volcaniques. L'île se compose de trois centres volcaniques d'âges différents. Ce sont, du plus vieux au plus jeune : les Collines d'argent, dans le nord, les Collines centrales, dans le centre, et le volcan actif de la Soufrière, Soufriere Hills, dans le sud. En outre, Garibaldi Hill et St. George's Hill forment deux petits reliefs isolés. L'intérieur de l'île est recouvert de végétation dense, à l'exception des larges zones touchées par les éruptions récentes. Les affleurements rocheux sont donc en grande partie limitée à des falaises côtières, des talus de route, et par des falaises intérieures.

 Vue satellite de Montserrat
ïle de Montserrat
Vue satellite et aérienne de la partie sud-ouest de l’île où se trouve le volcan de la Soufrière.
 Remarquer les zones dévastées par l’éruption depuis 1995.

  Le volcan de la Soufrière de Montserrat, homonyme de celui, actif, de la Guadeloupe, est en éruption depuis 1995. Ses nuées ardentes et coulées de cendres ont détruit puis enseveli la capitale de l'île, Plymouth. Les deux tiers des 12 000 habitants que comptait Montserrat ont émigré depuis lors, les autres trouvant refuge au nord, dans une zone située à l'abri du volcan.
L'île est principalement composée de laves et de roches andésitiques volcano-clastiques produites par les éruptions du dôme, bien que les collines au sud de la Soufrière soient basaltiques (basalte andésitique). Les principaux produits comprennent des restes de dômes d'andésite; des brèches andésitiques représentant les talus du dôme de lave; des dépôts de coulée pyroclastique formés par l'effondrement du dôme de lave; des lahars et des dépôts d'avalanches de débris. Sur le volcan de la Soufrière, on trouve des zones de roches hydrothermalement altérées, et des champs fumerolliens actifs (connus localement sous le nom de soufrières).

  Il ya eu cinq phases distinctes de l'éruption en cours :
1. une période d'extrusion, de 1995 à 1998, au cours de laquelle le dôme a grandi et s'est effondré à plusieurs reprises ;
2. une période d'activité résiduelle, de 1998 à 1999, lorsqu'il n'y avait pas d'extrusion de lave, mais plusieurs effondrements du dôme se sont produits, de même que des explosions de faibles à modérées ;
3. une période d'extrusion et une croissance renouvelée de la coupole, de 1999 à 2003, pendant lesquelles il y eut trois grands effondrements du dôme (l'une en mars 2000, l'autre en juillet 2001 et une troisième en juillet 2003) ;
4. une période de repos, de 2003 à 2005, contenant trois phases d'activité plus importantes avec projections de cendres et de vapeur, très occasionnellement des coulées pyroclastiques et des éruptions explosives ;
5. une cinquième phase de l'éruption a commencé en août 2005 et se poursuit jusqu'à nos jours. Cette phase a commencé avec une activité extrusive renouvelée et il y a eu un effondrement du dôme le 20 mai 2006. La croissance du dôme se poursuit depuis.

Montserrat - Guadeloupe
L’île de Montserrat vue depuis les côtes de la Guadeloupe.

  Le 5 février 2010, à 13 h 49, alors que le volcan était plutôt en période de faible activité, une explosion de type vulcanien d'une durée de sept minutes a généré des coulées pyroclastiques, en particulier dans la partie occidentale du volcan. Elles ont rapidement atteint la mer où elles se sont étalées sur une largeur d'environ 500 mètres.
Depuis, le volcan est de nouveau en activité élevée (niveau 4 sur une échelle de 5), et un effondrement partiel du dôme s'est produit le 11 février 2010. L'événement a duré 55 minutes. Les coulées pyroclastiques se sont intensifiées à 12 h 35 (heure locale). L'activité maximale a débuté à 13 h 04 et a commencé à décliner à 13 h 30.
Les coulées pyroclastiques les plus importantes se sont dirigées vers le NE, en direction du vieil aéroport de Trants et ont traversé la mer. Ces coulées à la surface de la mer, dans la partie NE de l'île, étaient visibles depuis le village de Lookout.
Selon les pilotes des hélicoptères survolant la zone, la colonne de cendres est montée jusqu'à une hauteur d’au moins 12 km avant de s'étirer vers le NE. Il n'y a eu que peu de retombées de cendres sur les zones habitées. Par contre, les courants d'air ont dispersé les cendres en nuage avant de les rabattre sur la Guadeloupe. Une panne d'alizés, et toute l'île s'est recouverte d'un manteau gris, recouvrant herbe, arbres, routes, rues, voitures. Les portes de crèches, écoles, collèges et lycées demeuraient closes, comme l'aéroport international de Pointe-à-Pitre, fermé depuis le 11 février 2010 (les fines particules de silice des cendres volcaniques, qui se transforment en verre à la haute température interne des réacteurs et turbopropulseurs aéronautiques, s'infiltrent partout), en pleine période de haute saison touristique.

  La question, qui reste ouverte, ce regain d’activité de Soufriere Hills, dans l’arc des Petites Antilles, est-il à mettre en relation avec le tremblement de terre d’Haïti ? En effet, le séisme aurait pu déstabiliser la chambre magmatique sous l’île, ainsi que le dôme, et provoquer l’éruption volcanique.

 

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